Mesures exceptionnelles pour le redressement du système collectif de distribution de la presse

Consultation publique

Article 18-7 de la loi du 2 avril 1947

Mesures exceptionnelles pour le redressement du système collectif de distribution de la presse

Date de publication sur le site Internet du Conseil supérieur des messageries de presse : 25 janvier 2018

Durée de la consultation publique : 14 jours

Modalités pratiques

Les contributions devront être adressées avant le 7 février 2018 à 17h00 :

-     soit par voie postale à l’adresse suivante :

Conseil supérieur des messageries de presse

Secrétariat permanent

Consultation publique - Mesures exceptionnelles pour le redressement du système collectif de distribution

99 boulevard Malesherbes 75008 PARIS

-    soit par courriel à l’adresse suivante :

secretariatpermanent@csmp-presse.fr (les contributions devront être envoyées en format Word, et Excel dans le cas de tableaux de données).

Toute personne intéressée peut présenter des observations sur la mesure envisagée à condition de justifier de son identité et d’indiquer en quoi elle est concernée par la mesure. Les observations ne satisfaisant pas à cette condition ne sont pas prises en compte.

Les contributions doivent comporter, en première page, le nom et les coordonnées de leur auteur.

Une seule contribution collective par association, institution, société, organisme, organisation professionnelle ou organisation syndicale sera exploitée. La contribution doit préciser en première page la qualité de sa personne signataire.

Les contributions seront considérées comme publiques et pourront être publiées sur le site Internet du Conseil supérieur des messageries de presse dans une partie librement accessible, à l’exception des éléments dont la confidentialité sera explicitement demandée. A cette fin, les contributeurs sont invités à reporter dans une annexe spécifique les éléments qu’ils considèrent devoir être couverts par le secret des affaires. Les contributeurs sont invités à limiter autant que possible les passages couverts par le secret des affaires.

Le Conseil supérieur des messageries de presse rendra publique une synthèse des observations reçues.

Exposé

Le système collectif de distribution de la presse traverse actuellement une crise grave due essentiellement à la situation dans laquelle se trouve la messagerie Presstalis. Mais, compte tenu du poids de cette messagerie dans la filière, de la fragilité des autres acteurs et de leur interdépendance, le risque de liquidation de Presstalis fait peser une menace sur l’ensemble du secteur.

La situation de la filière a été évoquée depuis plusieurs années dans les avis émis par la Commission de suivi de la situation économique et financière des messageries (CSSEFM) du CSMP, dont le dernier en date a été adopté le 19 décembre 2017. La Commission a maintes fois souligné que les deux messageries, Presstalis et MLP, sont en situation de grande fragilité. En particulier, elle a pointé la précarité des équilibres financiers de Presstalis, qu’il s’agisse de l’exploitation, du résultat exceptionnel structurellement déficitaire, des besoins de financement et du recours systématique à un affacturage onéreux pour y faire face, ou encore des capitaux propres très substantiellement négatifs.

Les risques que la CSSEFM avait anticipés se sont concrétisés, et bien au-delà, à partir de l’été 2017. En effet, il est apparu à l’automne 2017 que les résultats de Presstalis ne seraient pas en ligne avec le budget et seraient fortement négatifs. C’est dans ces circonstances que la nouvelle direction générale de cette messagerie a été conduite à demander au Tribunal de commerce de Paris la nomination d’un mandataire ad hoc puis à ouvrir une procédure de conciliation. Parallèlement, le Gouvernement a confié à M. Gérard Rameix, conseiller maître à la Cour des comptes et ancien président de l’Autorité des marchés financiers, une mission sur les perspectives de la distribution de la presse. Plus récemment, M. Marc Schwartz a rejoint cette mission.

Les représentants des éditeurs comme les pouvoirs publics considèrent qu’il n’est pas possible d’envisager une liquidation judiciaire de Presstalis car, compte tenu de la place de cette messagerie dans le système collectif de distribution et des relations d’interdépendance existant entre les acteurs, la disparition de cette messagerie et des dépôts qui lui sont rattachés entrainerait de graves conséquences pour l’ensemble de la filière, éditeurs et agents de la vente de presse. Les MLP seraient également affectées en tant que créancières du groupe Presstalis alors que leur trésorerie tendue (qui les a conduites à consommer les fonds qu’elles sont censées détenir pour le compte des éditeurs dont elles distribuent les titres et à recourir à l’affacturage) et leurs fonds propres négatifs les rendent vulnérables.

Le secteur coopératif de la distribution de la presse se trouve donc aujourd’hui face à une crise dont il ne peut sortir qu’au prix d’un très important effort de restructuration. Les chemins de retour vers une situation économique saine et soutenable, dans le contexte actuel d’attrition du marché, exigent une mobilisation intense des acteurs de la filière. Il y a une responsabilité collective des acteurs vis-à-vis de la situation actuelle. Comme le rappelle la loi Bichet, la solidarité entre acteurs ne relève pas d’un libre choix de chacun d’eux mais s’impose à eux.

La direction générale de Presstalis envisage des actions fortes de redressement. Elle reçoit le soutien des éditeurs représentés dans les conseils d’administration de la messagerie et de ses coopératives associées.

C’est dans ces circonstances qu’il est envisagé de prendre des mesures exceptionnelles pour créer les conditions d’un redressement de Presstalis et de l’ensemble de la filière.

Mesures envisagées

Dans le cadre des mesures d'intérêt général que le Conseil supérieur des messageries de presse peut prendre pour assurer le bon fonctionnement du système coopératif de distribution de la presse et de son réseau et en tant que garant du respect du principe de solidarité coopérative et des équilibres économiques du système collectif, il est envisagé d’adopter deux mesures exceptionnelles.

La première aurait pour objet d’instaurer temporairement une prorogation des délais de préavis fixés par la décision exécutoire n° 2012-01 du CSMP.

La seconde serait d’instaurer une contribution exceptionnelle de tous les éditeurs de presse au financement des plans de redressement que les deux messageries vont devoir mettre en œuvre.

A.    Prorogation temporaire des délais de préavis

L'Assemblée du CSMP a adopté le 21 février 2012 la décision n° 2012-01 qui a fixé la durée de préavis à respecter par les éditeurs qui veulent retirer la distribution d'un titre de presse à une messagerie de presse ou qui veulent se retirer entièrement d'une société coopérative de messageries de presse dont ils sont associés. Cette décision a été rendue exécutoire par la délibération n° 2012-03 de l’Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP) en date du 16 mars 2012. Par un arrêt du 20 juin 2013, la Cour d’appel de Paris a rejeté le recours en annulation qui avait été formé contre cette décision exécutoire.

Les préavis institués par la décision n° 2012-01, dont la durée varie en fonction de la durée des relations commerciales entre l’éditeur et sa messagerie et du volume des titres distribués, ont été mis en application sans difficulté dans la filière.

Depuis l’été 2016, Presstalis a reçu des notifications de préavis de la part d’un certain nombre d’éditeurs. Ces préavis sont parfois présentés comme « conservatoires » par leurs auteurs. Les mesures d’urgence que la nouvelle direction générale de Presstalis a été conduite à mettre en place au cours des dernières semaines, en particulier la suspension du règlement d’une partie des sommes à verser aux éditeurs au titre des ventes de journaux et magazines, ont accru le nombre d’éditeurs qui ont envoyé un préavis ou annoncé qu’ils allaient le faire. Si tous ces retraits annoncés devaient être effectifs dans les mois qui viennent, les efforts de redressement de Presstalis s’en trouveraient gravement compromis. Or, en cas d’échec de ce redressement, la liquidation judiciaire de la messagerie aurait un effet de souffle sur l’ensemble de la filière qui atteindrait les éditeurs ayant quitté celle-ci.

C’est pourquoi, dans cette phase cruciale pour l’ensemble des acteurs du secteur, le Conseil supérieur des messageries de presse envisage de prendre une mesure exceptionnelle afin d’éviter que des départs en chaîne d’éditeurs de Presstalis n’accentuent la déstabilisation de cet opérateur et ne compromettent le succès de son plan de redressement.

La mesure envisagée vise à allonger, à titre exceptionnel, d’une durée supplémentaire de six mois tous les délais de préavis définis aux articles 1er et 2 de la décision exécutoire n° 2012-01 du CSMP. Cette prolongation exceptionnelle de la durée des préavis s’appliquerait à tous les préavis en cours d’exécution à la date d’adoption de la décision par l’Assemblée du Conseil supérieur des messageries de presse. Elle s’appliquerait aussi à tous les préavis notifiés après l’adoption de la mesure par l’Assemblée et ce jusqu’au 1er août 2018.

B.    Contribution exceptionnelle des éditeurs au redressement des messageries

Ainsi qu’il a été indiqué dans l’exposé, la situation économique et financière des messageries de presse, telle qu’elle ressort notamment des avis émis par la CSSEFM, n’est pas du tout satisfaisante. Presstalis est certes bien plus mal en point que les MLP, mais cette dernière n’est pas non plus en pleine santé. Elle a également des capitaux propres consolidés négatifs et, pour faire face à ses besoins d’exploitation, elle a également consommé les fonds qu’elle détient pour le compte des éditeurs dont elle distribue les titres (ducroire) et est amenée à recourir à l’affacturage, mécanisme onéreux de financement à court terme, pour faire face à ses besoins de trésorerie. En outre, l’affacturage est par nature volatile et les ressources qu’il procure peuvent se tarir en cas de crise affectant l’ensemble du secteur.

Il apparaît donc indispensable que l’ensemble des éditeurs mobilisent des moyens supplémentaires pour financer les mesures de restructuration indispensables pour consolider les deux messageries et assurer ainsi la pérennité du système collectif de distribution de la presse dont ils sont bénéficiaires.

Il convient en effet de rappeler que ce système collectif assure un accès à la distribution de tous les éditeurs, quelle que soit leur taille et leurs moyens, à des conditions tarifaires déterminées par les assemblées générales des coopératives et qui « permettent d'assurer l'égalité des éditeurs face au système de distribution » ainsi que l’énonce l’article 12 de la loi du 2 avril 1947.

Le Conseil supérieur envisage par conséquent d’imposer à tous les éditeurs actionnaires des sociétés coopératives de messageries de presse, de contribuer au financement du plan pluriannuel de redressement que chaque messagerie sera tenue d’adopter dans un délai de trois mois. Ce plan, qui aura vocation à s’appliquer de 2018 à mi-2022, devra comporter

(i)    des mesures d’économie et de restructuration permettant d’améliorer les conditions d’exploitation de la messagerie ;

(ii)   des mesures de reconstitution des capitaux propres ;

(iii)  des mesures de reconstitution des fonds détenus pour le compte des éditeurs (ducroire).

Le financement de ce plan pluriannuel serait assuré par une contribution exceptionnelle des éditeurs sous la forme d’un prélèvement mensuel de 2,25% sur les ventes en montant fort de leurs titres distribués dans le cadre coopératif, y compris les exportations et les ventes des titres importés. Ce prélèvement s’appliquerait pendant neuf semestres (du début de l’exercice 2018 jusqu’au 30 juin 2022) et s’ajouterait aux commissions dues en application des barèmes adoptés dans les conditions définies à l’article 12 de la loi du 2 avril 1947.

Pour permettre aux messageries de mobiliser dès maintenant les financements nécessaires à la mise en œuvre rapide des mesures de redressement, il est envisagé de permettre aux éditeurs de presse qui en ont la capacité financière, sur demande de leur coopérative, de faire à celle-ci une avance en compte courant d’actionnaire correspondant à tout ou partie du montant cumulé prévisionnel de leur contribution. Les sommes avancées ne pourraient être utilisées que pour financer les mesures du plan pluriannuel de redressement de la messagerie concernée.

Les conditions dans lesquelles l’avance serait accordée devraient évidemment être identiques pour tous les éditeurs adhérant à une même société coopérative. Elles seraient précisées dans une convention à conclure par la coopérative avec chacun des éditeurs concernés. Les sommes avancées seraient bloquées et ne pourraient donc pas être remboursées avant la fin de l’exercice 2022. De plus, même après que l’avance aura cessé d’être bloquée, le remboursement ne pourrait intervenir que si la situation économique et financière de la messagerie le permet. L’avance pourrait porter intérêt mais à un taux ne pouvant excéder 4% par an.

Les éditeurs ayant consenti une avance en compte courant permettant de mobiliser immédiatement des ressources plus importantes que celle procurée par la contribution exceptionnelle de 2,25% prélevée au fil des ventes, verrait le montant de leur contribution réduite proportionnellement au montant de leur avance. Ainsi, un éditeur qui apporterait sous forme d’avance un montant égal à la totalité du montant cumulé prévisionnel de sa contribution sur neuf semestres ne se verrait prélever aucune contribution. Cet éditeur prendrait en revanche le risque de perdre la totalité de l’avance dans le cas où la messagerie ne parviendrait pas à se redresser et, en tout état de cause, il ne serait remboursé qu’à partir de 2023 et uniquement en cas de retour de la messagerie à meilleure fortune.

Dès lors que le plan pluriannuel aura été arrêté par chaque messagerie en début de période sur la base des prévisions de ressources qui seront obtenues par la contribution exceptionnelle des éditeurs sur les neuf semestres à venir, donc sur la base des ventes prévisionnelles des titres que la messagerie distribue au moment où elle établit le plan, il est envisagé de neutraliser l’effet qui pourrait résulter des décisions des éditeurs de changer de messagerie pendant cette période (après que la prolongation exceptionnelle de la durée des préavis aura pris fin). Il faut en effet éviter que la mise en œuvre des plans de redressement ne soit remise en cause par des modifications dans le portefeuille de titres distribués par les messageries. C’est pourquoi, il est envisagé que, pour les titres dont la distribution changera de messagerie pendant cette période, la contribution appelée sur les ventes restera due à la messagerie d’origine. La messagerie reprenant la distribution du titre procédera à l’appel de la contribution mais reversera les sommes ainsi collectées à la messagerie d’origine. 

Pièces accessibles